L’émergence des entreprises agroécologiques sur le marché

Par

Lothar J. Lechner Bazzanella, Biovision.

Lucy Asiimwe, responsable du projet « Neycha Accelerator Fund », explique les objectifs, les défis et les succès du programme, qui consiste à aider des entreprises émergentes en Afrique de l’Est à devenir plus durables et plus compétitives sur le marché.

Quels sont les objectifs principaux de Neycha?

Notre objectif principal est d’identifier et de soutenir les entreprises agroécologiques orientées croissance. Nous les aidons à améliorer leur modèle d’affaires et à obtenir des soutiens financiers afin qu’elles puissent renforcer leurs pratiques écologiques tout en restant rentables.

Comment l’accélérateur les aide-t-il concrètement?

Nous utilisons le « Business Agroecology Criteria Tool » pour évaluer le profil agroécologique des entreprises. Cet outil permet une analyse détaillée de l’ensemble de la chaîne de valeur, de l’approvisionnement en matières premières à la commercialisation en passant par la production. Nous identifions ainsi les entreprises susceptibles de promouvoir encore davantage leurs pratiques écologiques et les domaines à renforcer pour y parvenir.

Lucy Asiimwe Interview Neycha

Lucy Asiimwe

Ist Projektmanagerin bei «Neycha
Accelerator Fund»

Des ouvrières mettent des herbes dans des bocaux dans une usine de production.

Qu’advient-il ensuite de ces entreprises?

Après la phase d’évaluation, nous les assistons individuellement avec des conseils techniques et des moyens financiers. Nous développons avec elles un plan de croissance sur trois ans qui contient des objectifs écologiques et financiers. Ces plans aident les entreprises à améliorer leurs pratiques pour assurer durabilité et croissance. Dans nos programmes de cohortes, les entreprises reçoivent un soutien axé sur la pratique ainsi qu’un capital pour pouvoir accroître leurs performances écologiques et économiques.

Comment l’accélérateur a-t-il aidé les entreprises de la première cohorte et quels retours avez-vous obtenus?

L’équipe de la première cohorte a particulièrement apprécié le soutien technique et bien évidemment aussi le capital perçu durant le programme. Nombreuses sont les personnes à reconnaître que l’agroécologie occupait une place stratégique dans leur modèle d’affaires et n’était pas juste secondaire. Les conseils personnalisés et axés sur la pratique les ont aidées à prendre des mesures concrètes pour améliorer leur performances écologiques et financières.

À quels défis les entreprises agroécologiques sont-elles confrontées en Afrique de l’Est?

Les prix élevés pour maintenir les standards écologiques constituent l’un des plus grands défis. Les entreprises doivent investir dans la formation et aider les paysan·nes à travers une offre de prestations. L’autre problème concerne l’accès aux marchés, car les produits bio s’y retrouvent en concurrence avec les produits conventionnels. À cela s’ajoute l’environnement fiscal, qui représente une barrière difficile à franchir et qui freine la bonne marche des affaires. Les impôts élevés et la complexité du système, rendent la gestion d’entreprise très difficile.

Quelle importance revêt la sensibilisation aux pratiques écologiques?

Le travail de sensibilisation est décisif pour favoriser le passage à des pratiques agroécologiques. Peu de personnes connaissances les avantages et les perspectives qu’offre l’agroécologie. Il est important de diffuser ces informations et de montrer que les pratiques durables ne sont pas seulement bonnes pour l’environnement mais aussi avantageuses sur le plan économique.

Un livreur vient chercher des produits frais dans un marché local.

Que retirez-vous de la collaboration avec les entreprises et qu’avez-vous dû changer?

L’un des principaux enseignements que j’ai tirés est que le suivi individuel et l’interaction directe avec les entreprises sont essentiels pour aller en profondeur et instaurer un rapport de confiance. Cela nous permis de développer des plans de croissance réalistes et efficaces. Nous avons également constaté qu’il était important d’être flexible et en capacité de rectifier au besoin l’analyse de la santé financière et du potentiel écologique de l’entreprise.

Comment le marché de l’agroécologie va-t-il se développer dans la décennie à venir?

Pour le moment, l’agroécologie est encore marginale. Mais je pense que son potentiel sur les dix prochaines années est énorme. Les gens ont de plus en plus conscience des enjeux de sécurité alimentaire, d’une part, et de production et de consommation responsables, d’autre part. Et cette évolution est facilitée par les efforts menés dans l’éducation et la formation. Quand les entreprises s’apercevront qu’il existe un marché pour les produits agroécologiques, et qu’en adoptant ces pratiques, elles diminuent leurs coûts d’exploitation et peuvent vendre leur production à meilleur prix, ce marché progressera.

Qu’est-ce qui vous motive personnellement à vous investir pour l’agroécologie?

L’agroécologie intègre des aspects tels que la protection du climat, la biodiversité, la fertilité des sols et la justice sociale. Cette approche globale de l’écosystème est pour moi la plus intelligente. Et dans ce contexte, je suis aussi amenée à remettre en question mes propres habitudes et mon comportement de consommation. L’agroécologie n’est pas juste un engagement dans ma vie professionnelle, elle a aussi une incidence sur mon style de vie et mes décisions personnelles.

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