Portrait en bref du projet « Filière alimentaire des Vergers »
La Filière alimentaire des Vergers, située dans la cité-satellite de Meyrin, aux portes de Genève, est née de la volonté des habitant·es du nouveau quartier des Vergers de participer à l’élaboration de leur propre système alimentaire. Aujourd’hui, la Filière démontre qu’une chaîne alimentaire locale peut être organisée de manière globale à l’échelle d’un quartier : la Ferme des Vergers et les autres fermes participatives rattachées au projet produisent une partie des légumes et des céréales qui sont consommés localement. La ferme se trouve au cœur même du quartier. Les aliments sont transformés sur place par la Coopérative des ateliers paysans (CAP), qui exploite une fromagerie, une boulangerie et une boucherie. Ils sont ensuite vendus au Supermarché Participatif Paysan ou dans les restaurants du quartier. Le supermarché propose notamment un abonnement hebdomadaire, la formule « Locali », qui inclut des produits alimentaires de base tels que légumes, fruits, pain, huile ou encore produits laitiers. Le rapprochement entre l’habitat et l’alimentation, entre mangeur·euses et producteur·trices, réintroduit de la conscience dans l’alimentation.
Avec le projet « Exemples de bonnes pratiques pour un système alimentaire durable », Biovision offre une tribune aux initiatives et projets en Suisse qui contribuent à façonner un système alimentaire durable. Nous souhaitons démontrer que des solutions viables existent et qu’un changement vers plus de durabilité est possible !
Filière alimentaire des Vergers en ligne
Cette vidéo a été réalisée dans le cadre des voyages d’apprentissage du premier Conseil citoyen suisse. Le projet « Filière alimentaire des Vergers » s’y présente.
Résilience et diversité à l’honneur : la Ferme des Vergers
Le projet se distingue par différents aspects et convainc par son approche globale. Il présente une forte résilience grâce à l’agriculture biologique et naturelle pratiquée par la Ferme des Vergers et les autres fermes participatives (principes 3 à 6 du graphique ci-dessus). Parallèlement à la production de denrées alimentaires, la Ferme des Vergers a deux autres vocations : entretenir les espaces extérieurs du quartier et animer des activités pédagogiques. Elle organise par ailleurs différents événements tout au long de l’année. Parallèlement aux débouchés qu’offre le quartier pour les produits alimentaires, le projet présente une diversification économique élevée (principe 7).
Un projet participatif citoyen : le supermarché La Fève
En tant que projet citoyen, la Filière a pour ambition de rapprocher la population des paysan·nes et de transmettre les bases d’un rapport respectueux à la nature. Mais la Ferme des Vergers n’est pas la seule structure participative : le supermarché est lui aussi organisé en autogestion, avec ses 250 coopérateur·trices participant·es. Leur rôle ? Codécider de la liste des produits commercialisés et consacrer au moins deux heures par mois à la vente. La transformation a vocation à devenir encore plus participative afin notamment de renforcer la cohésion entre les habitant·es du quartier autour de projets communs. Le caractère participatif et local du projet conduit donc à une forte connectivité (principe 11).
Une identité paysanne
Le supermarché n’est pas seulement participatif, mais aussi paysan. Eux·elles aussi membres de La Fève, les paysan·nes vendent leur récolte selon des contrats négociés au préalable. Lorsque les disponibilités des paysan·nes le permettent, les consommateur·trices peuvent échanger avec eux·elles et s’enquérir de leurs besoins, de leur réalité, mais aussi de leur savoir-faire. Les consommateur·trices deviennent ainsi plus conscient·es de leur alimentation. Tous ces éléments contribuent à la co-création de connaissances (principe 8), aux valeurs sociales et aux types d’alimentation (principe 9) ainsi qu’à la notion d’équité (principe 10).
Comment fonctionne l'évaluation avec l'outil
B-ACT ?
Le B-ACT reflète l’orientation des entreprises, des projets et des initiatives vers les 13 principes agro-écologiques du « High Level Panel of Experts on Food Security and Nutrition » (HLPE).
Chaque principe s’inscrit dans l’un des trois thèmes généraux :
- Augmenter l’efficacité des ressources
- Renforcer la résilience
- Assurer la justice sociale
Pour tous les principes, Biovision a élaboré des questions en collaboration avec des partenaires, qui ont été intégrées dans le B-ACT. Plus le nombre de questions auxquelles il est possible de répondre positivement pour une initiative ou un modèle commercial est élevé, plus la contribution au principe correspondant est importante.
Un projet qui marque des points
- Ce projet citoyen s’inscrit dans une démarche globale qui couvre l’ensemble de la chaîne alimentaire. Il réunit plusieurs paysan·nes et inclut également les étapes de transformation, de distribution et de consommation. Le projet dépasse les frontières de la ferme en s’appuyant sur le concept d’agriculture solidaire.
- Ce projet participatif et paysan constitue un véritable laboratoire. Depuis 2018, des expériences sont réalisées et des connaissances acquises autour de la mise en place de systèmes alimentaires locaux participatifs, soutenus sur le long terme par l’ensemble des parties prenantes.
- L’écoquartier des Vergers réunit plusieurs coopératives d’habitation. Le projet associe donc une alimentation socialement équitable, durable et saine à un habitat tourné vers l’avenir. Les champs cultivés par la Ferme des Vergers se trouvent au cœur même du quartier : les habitant·es peuvent se nourrir avec ce qui pousse au pied de leur immeuble. Le supermarché participatif, mais aussi la fromagerie, la boulangerie et la boucherie, sont également implantés dans le quartier. Le projet permet non seulement de prendre conscience de la surface de terres dont nous avons besoin pour vivre, mais aussi de la manière dont celles-ci sont cultivées et de la responsabilité que nous pouvons assumer à cet égard.
Quels sont les défis à relever par Filière alimentaire des Vergers ?
La dimension participative du projet citoyen constitue à la fois une chance et un défi. D’une part, il est difficile de trouver la forme adéquate de participation pour l’ensemble des parties prenantes. Par exemple, le surcroît de travail lié aux réunions avec les fermes participantes ou à l’encadrement des membres ne doit pas devenir trop pesant pour les paysan·nes. D’autre part, la sensibilisation et la communication sont essentielles. Pour l’heure, seule une petite partie des habitant·es du quartier sont membres du supermarché participatif et s’y approvisionnent. Il est primordial que le nombre de coopérateur·trices et le volume des ventes progressent. L’idée est convaincante, mais sa mise en œuvre est complexe dans une société axée sur la consommation et la performance. De nombreuses personnes n’ont ni le temps ni le loisir de s’informer sur le projet ou de s’engager pour une alimentation durable. Enfin, le projet n’est pas accessible à tout·es : bien que la solidarité soit une valeur clé du projet, ce sont surtout les classes moyennes supérieures qui y participent et qui peuvent par exemple s’acquitter des prix plus élevés pratiqués par le supermarché.
Une volonté politique est nécessaire pour que le projet citoyen puisse s’établir et devenir réplicable. L’administration du projet doit être soutenue afin d’atteindre un public plus large et de créer des conditions cadres favorables. En juin 2023, le peuple genevois a accepté à 68 % d’inscrire le droit à l’alimentation dans sa Constitution. L’engagement du canton en faveur du droit à une alimentation adéquate, c’est-à-dire saine et de saison pour tou·tes, pourrait constituer un fondement important pour développer des projets tels que la Filière alimentaire des Vergers.