La politique alimentaire a besoin d’un coup d’accélérateur

Un comité scientifique et une assemblée citoyenne élaborent des recommandations visant à concevoir une politique alimentaire d’avenir pour la Suisse. Ils parviennent à la même conclusion : la transformation est une tâche qui incombe à l’ensemble de la société et pour laquelle tous les acteurs doivent être mis à contribution. Un changement de paradigme se profile. La balle est désormais dans le camp des politiques.

Les choses bougent malgré tout dans le domaine de la politique agricole et alimentaire suisse. Après des votations populaires polarisantes mais infructueuses et le blocage d’une réorientation de la politique agricole au Parlement, un changement de paradigme s’est dessiné lors du premier Sommet Suisse sur le Système Alimentaire. Près de 300 représentant·es de la production, du commerce et de la consommation, mais aussi du monde scientifique, de la société civile, du monde politique et de l’administration ont examiné des propositions visant à élaborer une politique alimentaire pertinente. Conclusion du sommet : il est possible d’opérer une transformation du système alimentaire qui soit bénéfique pour tous et serve à la fois l’environnement, la production et la population. Pour que cette transformation ait réellement lieu, il est nécessaire de prendre rapidement des mesures concrètes tout au long de la chaîne de valeur.

Les scientifiques et la population parviennent à des conclusions similaires

En préparation du sommet, un comité scientifique et une assemblée citoyenne ont formulé, indépendamment l’un de l’autre, des recommandations détaillées sur l’élaboration d’une politique alimentaire durable. Le comité scientifique a analysé les domaines dans lesquels il faut agir en priorité et les leviers à actionner pour atteindre les objectifs sociétaux (voir la publication « L'avenir de l'alimentation en Suisse – Livre blanc des principaux leviers et des pistes politiques pour un système alimentaire durable »). Les recommandations de l’Assemblée Citoyenne mettent quant à elles en évidence les points susceptibles de recueillir une majorité au sein d’une population avertie. Étonnamment, les deux démarches ont abouti à des conclusions similaires. Les deux organes recommandent notamment de favoriser de manière ciblée le passage à une production durable tout en encourageant une consommation durable. En réduisant la consommation excessive de viande, il est même possible d’augmenter le taux d’auto-approvisionnement de la Suisse. Compte tenu des revenus souvent faibles dans l’agriculture et l’industrie alimentaire, une transformation du système alimentaire doit également être organisée de manière socialement équitable.

La balle est désormais dans le camp des politiques

Il appartient aux responsables politiques d’établir les conditions-cadres nécessaires, et pas seulement dans le secteur de l’agriculture. Dans son discours de bienvenue, Guy Parmelin, conseiller fédéral en charge de l’agriculture et de l’industrie alimentaire, a souligné que les recommandations de l’Assemblée Citoyenne et du panel d’experts coïncidaient avec l’orientation future de la politique agricole. C’est une bonne nouvelle. Cependant, le Conseil fédéral a défini un objectif à l’horizon 2050, et les mesures prévues à moyen terme sont plutôt superficielles, comme par exemple une gestion plus flexible de la date limite de consommation des denrées alimentaires.

Au lieu de repousser la transformation du système alimentaire à une date ultérieure, il importe désormais d’intégrer les présentes recommandations dans le processus politique et de négocier une mise en œuvre rapide avec les différents acteurs tout au long de la chaîne de valeur. L’heure n’est définitivement plus aux tergiversations et aux guerres de tranchées.

Le commerce doit également prendre des mesures

Par ailleurs, lors du sommet, tout le monde est tombé d’accord sur le fait que la production et la consommation ne pourront évoluer que si des mesures efficaces sont également prises au niveau des grands distributeurs. Si la population, les scientifiques et les autorités compétentes parviennent indépendamment les uns des autres à des conclusions similaires, il est temps que le commerce passe également à l’action. Il ne faut plus que la durabilité soit considérée comme un luxe réservé à celles et ceux qui le souhaitent et qui en ont les moyens. Elle doit devenir une exigence de base pour la composition de l’assortiment.

Pour cela, il faut que les responsables politiques établissent les conditions-cadres nécessaires, et pas seulement dans le secteur de l’agriculture. Le rapport du postulat sur la politique agricole 22+ va certes dans la bonne direction, mais avec 2050 pour horizon. Au lieu de repousser la transformation du système alimentaire à une date ultérieure, il importe désormais d’intégrer les présentes recommandations dans le processus politique et de négocier une mise en œuvre rapide avec les différent