Tomates : choisir entre des rouges, des vertes et des pas mûres !

Par

Alessandra Roversi, Biovision

Tous les êtres humains partout dans le monde consomment quasi quotidiennement des tomates ! Originaire d’Amérique du Sud, elle est cultivée sur des millions d’hectares sous presque toutes les latitudes. Savourée crue ou cuite dans des milliers de recettes, elle est aussi omniprésente dans d’innombrables produits transformés. Quels sont les enjeux de la production et consommation responsable de la « pomme d’or » ?

Un concentré de mondialisation

« Le monde est notre champ » (The world is our field) est le slogan expansionniste qu’Henry John Heinz, fondateur de la célèbre marque de ketchup a utilisé dès 1886 pour refléter l’incroyable essor de son entreprise. Le célèbre flacon rouge « Heinz » (dont il se vend annuellement 650 millions d’unités à travers le monde) rivalise avec la bouteille de Coca-Cola pour le titre de symbole du capitalisme. Cette économie mondialisée de la tomate d’industrie est révélée dans une grande enquête du journaliste Jean-Baptiste Malet qui suit le parcours des barils de concentré de tomates entre la Chine, l’Italie, la Californie et le Ghana (« L’empire de l’or rouge » à découvrir en livre ou en documentaire).

La filière de la tomate d’industrie est lucrative et très opaque. Entre utilisation de pesticides interdits, contrefaçons, migrants exploités dans les champs et additifs suspects (amidon ou soja), les impacts environnementaux et sociaux de la tomate d’industrie sont à couper l’appétit.

De nombreuses soupes, sauces, pizzas, condiments, boissons, conserves qui contiennent de la tomate (en concentré, en poudre…) n’affichent pas de façon transparente la provenance des ingrédients. Sans provenance claire, on soupçonne que les ingrédients sont issus de productions agricoles intensives qui pèsent lourdement dans le bilan durabilité du produit (par exemple ce pesto rosso, cette sauce tomate à base de concentré et cette pizza « tomates et mozzarella »).

Chauffage sous serre et gaz à effet de serre

Faire sa pizza soi-même avec des tomates fraîches est une alternative plus durable. Mais quelles tomates choisir ? L’offre entre tomates locales, bio, variétés nouvelles ou anciennes, indigènes ou étrangères est énorme sur nos étals. Les tomates provenant des régions du sud de l’Europe (par exemple en Espagne) sont souvent cultivées à grande échelle, sous serres et avec une irrigation intensive en zone aride. A ce bilan négatif sur les ressources (sol et eau) s’ajoutent des conditions de travail précaires pour des migrants peu rémunérés et exposés à divers produits agrochimiques dans les champs.

Les tomates cultivées en Suisse obtiennent une meilleure évaluation au niveau de leur impact social grâce aux bonnes conditions de travail pour les ouvriers et ouvrières mais aussi un bon bilan environnemental. Principal bémol : les tomates suisses disponibles à la vente au détail sont essentiellement cultivées sous des serres chauffées durant plusieurs mois de l’année. Cet impact négatif sur le bilan carbone pourrait être amélioré par exemple en arrêtant de chauffer plus tôt dans la saison grâce à une meilleure isolation ou en utilisant plus de sources alternatives d’énergie (dérivées du bois, chauffage urbain, etc.).

Les normes de BioSuisse encadrent de façon plus stricte le chauffage des serres. Pour les cultures comme les tomates, le chauffage est autorisé uniquement dans les serres disposant de parois et de toit isolés, pas à plus de 10°C et seulement entre début décembre et fin février. Les serres qui ne sont pas isolées correctement peuvent être tempérées à 5°C pour éviter le gel.

Farbige Cherrytomaten lokal biologisch alte und neue Sorten
Tomates : comment choisir entre tomates locales, bio, variétés anciennes et nouvelles, produites sous serre ou non?

Le fruit défendu hors saison

Trop chaud dans les serres et trop froid dans les camions frigorifiques : les tomates les plus savoureuses sont locales et estivales. Les maraîchers suisses proposent aujourd’hui un grand choix de tomates d’avril à novembre mais le calendrier saisonnier de Biovision propose plutôt de mai à octobre, la pleine saison pour des tomates au goût ensoleillé.

C’est à cette période qu’on peut acheter les meilleures tomates à maturité en vente directe, chez des producteurs régionaux de proximité qui privilégient différentes variétés et des modes de culture durables comme le bio. C’est aussi le meilleur moment pour en planter sur son balcon et découvrir des variétés inconnues dans les supermarchés avec des noms colorés comme « Président Garfield », « Lucullus », « Black Russian » ou encore « Prune Carmen » (kits de démarrage « Tomates Urbaines » avec ProSpecieRara).

Manger local et agir global

Les défis de la production de tomates ne se limitent pas à nos champs et nos balcons. Qui dit cultures mondialisées dit aussi ravageurs identiques se propageant partout. La tomate est attaquée depuis plus d’une dizaine d’années par un insecte au potentiel très destructeur comme l’indique son nom : la Tuta absoluta.

Ce minuscule papillon est aujourd’hui la plus grande menace phytosanitaire pour les cultures de tomates, en Afrique, en Europe (en Suisse depuis 2009) et en Asie. La recherche d’une lutte antiparasitaire durable, écologique et intégrée revêt une pertinence mondiale. Au Kenya et en Ouganda, Biovision et ses partenaires sont actifs dans la lutte biologique contre ce ravageur pour garantir la sécurité alimentaire de centaines de familles paysannes. La tomate est pour ces famille rurales une source de minéraux et vitamines mais aussi de revenus lors de la vente au marché.

En Suisse comme au Kenya et en Ouganda, produire et manger des tomates durablement passe par des enjeux similaires : un système favorisant les petits producteurs et garantissant le respect de normes sociales strictes, des cultures diversifiées, agroécologiques et peu gourmandes en ressources.

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