Le gâchis alimentaire

Par

Florian Blumer, Biovision

Pendant des décennies, la coopération au développement cherchait surtout à augmenter la production. Mais un facteur décisif dans la lutte contre la faim, selon la FAO, restait ignoré : la nourriture perdue.

La population mondiale ne cesse de croître. Selon les estimations, elle passera de 7,7 milliards actuellement à 10 milliards d’ici 2050. Malgré les progrès accomplis, une personne sur neuf n’a toujours pas assez à manger et la faim augmente à nouveau. Comment l’humanité peut-elle produire assez de nourriture pour que tout le monde soit rassasié ?

La question semble évidente – mais elle est mal posée. Selon la FAO, l’humanité produit déjà beaucoup plus de nourriture qu’elle n’en consomme, car… 30 % des aliments finissent dans les déchets.

Les gens ont faim… parce que la nourriture se gâte

Le problème du gaspillage alimentaire est bien connu aujourd’hui : face aux ressources limitées et au changement climatique, nous ne pouvons plus nous permettre de jeter ainsi la nourriture. De plus en plus de gens s’en rendent compte. En revanche ce qui est moins connu, c’est que beaucoup se perd en route, même dans les pays les plus pauvres. Et ce n’est pas dû aux consommateurs/ trices, mais aux producteurs/trices, pendant le stockage et le transport. Là aussi, un bon quart de la nourriture est perdue, avec le terme technique de circonstance : « food loss ». C’est ce qui manque aux personnes qui meurent de faim.

Du Nord au Sud, le problème est le même, mais les raisons sont on ne peut plus différentes. Ici, c’est la surabondance – on élimine des marchandises qui n’ont pas l’air parfaites dans les magasins, on gaspille dans les ménages. Là-bas, c’est le manque : mauvaises routes, systèmes déficients de refroidissement et d’entreposage, etc.

Solutions souvent faciles et peu coûteuses

Une étude réalisée en 2015 par le Centre africain de recherche sur les insectes icipe et l’EPFZ de Zurich a montré qu’un quart de la récolte de maïs en Afrique subsaharienne est perdue – par la moisissure ou les insectes. Michael Brander, scientifique à l’EPFZ et ex-collaborateur de Biovision, mène des recherches sur les pertes après récolte depuis des années. Les solutions sont souvent simples et bon marché : en Tanzanie, par exemple, des sacs de récolte hermétiques ont été introduits pour protéger le maïs. Le nombre de familles souffrant de la faim durant les mois précédant la prochaine Le gâchis alimentaire récolte a diminué de 40 %, selon une expérience de terrain coordonnée par Michael Brander

Ce dernier conclut : « Réduire les pertes après récolte offre un potentiel élevé pour lutter contre la faim. Or il est sous-estimé ». La FAO souligne également l’importance de cette approche. Brander ajoute qu’au cours des 20 ou 30 dernières années, la coopération et les politiques de développement se sont concentrées sur l’augmentation de la production : « Le système agricole dans son ensemble a rarement été envisagé – et les pertes après récolte en font partie. »

Bidons de lait non réfrigérés

Il en va autrement dans le projet Biovision « Chameaux contre sécheresse» . De la savane au consommateur, le précieux lait de chamelle n’était auparavant pas réfrigéré et devenait aigre. C’était néfaste pour les producteurs/trices et les commerçant-e-s qui pouvaient vendre moins de lait – mais aussi pour les consommateurs/trices, avec un risque d’attraper diverses maladies. Biovision et son partenaire de projet VSFSuisse soutiennent donc le développement d’une chaîne hygiénique de la traite à la vente en passant par une formation à tous les niveaux.

Aujourd’hui, un camion frigorifique assure un transport rapide vers la capitale. La prochaine étape sera la construction d’étals hygiéniques à Nairobi et un point de collecte de lait refroidi par énergie solaire auprès des producteurs/trices. Le transport en moto chargée de bidons de plastique – comme raconté dans cette histoire – devrait bientôt appartenir au passé. Fini le gaspi !

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