Notre (sur)vie dépend du sol

Par

Martin Grossenbacher, rédacteur

Le sol constitue la base de la vie, de la production de nos aliments et de la biodiversité. Pourtant, la conscience de l’importance de cette ressource essentielle est encore très faible. C’est pourquoi le thème du sol sera à l’honneur de nos publications durant ces prochains mois.

Quand avez-vous mis les mains dans la terre pour la dernière fois en la laissant ruisseler entre vos doigts ? Quelle était son odeur ? Était-elle sèche ou humide ? Avez-vous senti ou vu de la matière organique ? Nous considérons la terre comme une ressource illimitée, toujours disponible, alors que nous n’en voyons que la surface et que nous n’avons souvent pas conscience de la vie foisonnante qui grouille sous nos pieds. Chez Biovision, nous avons décidé de vous emmener dans les profondeurs de la croûte terrestre : le sol constituera le thème prioritaire de nos publications au cours des six prochains mois. Nous vous proposerons des histoires fascinantes et des découvertes actuelles surprenantes issues de la pratique et de la science pour vous familiariser avec la fonction d’habitat du sol et vous sensibiliser à la nécessité d’en prendre soin et de le protéger.

Le sol : la base de la vie

Le sol est la couche supérieure vivante de la croûte terrestre. D’une épaisseur de quelques centimètres à plusieurs mètres, il est constitué de minéraux, d’humus, d’eau, d’air et d’organismes. Sa formation est très longue : il faut 150 ans pour former un millimètre de sol, jusqu’à 10 000 ans pour constituer une couche de 30 cm. Un sol sain possède une bonne structure. Il est constitué d’interstices suffisamment grands, appelés pores, pour stocker l’eau et permettre à l’air de circuler. Des milliards d’organismes vivants y trouvent refuge. Selon le type de sol (p. ex. sable, tourbe ou argile), les pores peuvent représenter jusqu’à quatre cinquièmes du volume total. Si l’on mettait côte à côte les pores d’une simple poignée de terre argileuse, on obtiendrait une surface de plus d’un kilomètre carré, soit plus de 20 000 fois la surface moyenne d’habitation d’une personne en Suisse.

Le sol recèle encore bien des secrets. Nous ne connaissons encore qu’une infime partie des innombrables espèces qu’il abrite. (Tiré de: Bodenatlas 2015, Bartz/Stockmar)
Der Lebensraum Boden birgt noch viele Geheimnisse. Nur ein Bruchteil der unzähligen Arten, die in ihm leben, ist bisher erforscht. (Bild: www.boell.de/de/bodenatlas, Grafik: Bartz/Stockmar, CC-BY-SA 3.0)

Le sol est nécessaire à la vie des plantes, des animaux et des êtres humains. C’est un écosystème complexe : les racines des plantes et les filaments mycéliens y forment de vastes réseaux souterrains, qui leur permettent de puiser et d’échanger des nutriments et de l’eau ainsi que de communiquer entre eux. Le sol abrite d’innombrables organismes tels que vers de terre, coléoptères, collemboles, punaises, champignons, bactéries ou algues. Chaque organisme apporte sa contribution à l’écosystème, par exemple en dégradant les plantes et les animaux morts, ce qui améliore la fertilité du sol.

Disparition progressive des sols

La fertilité de nos sols a beau être déterminante pour notre survie, nos connaissances à ce sujet sont lacunaires et notre conscience de la menace qui pèse sur cette ressource est encore faible : jour après jour, nous perdons de nouvelles surfaces de sol fertile partout dans le monde. À ce jour, pas moins de 75 % des terres de la planète sont dégradées, c’est-à-dire partiellement ou totalement infertiles. C’est à cette conclusion qu’est parvenu en 2015 le Conseil mondial de la biodiversité (IPBES) dans une étude scientifique sur l’état des sols à l’échelle planétaire (« Assessment Report on Land Degradation and Restoration », 2015). La dégradation des sols, qu’elle soit due à la désertification, à la pollution ou au déboisement en vue d’un usage agricole intensif, est également la première cause d’extinction des espèces. Si la tendance se poursuit au même rythme que jusqu’à présent, 95 % des terres de la planète pourraient être dégradées d’ici 30 ans.

Quelle est la situation en Suisse ? Dans sa Stratégie Sol 2020, le Conseil fédéral formule le constat suivant : « La perte continue de précieuses terres cultivables (surfaces agricoles, y c. économie alpestre et sylviculture), les expériences dans l’application de la législation environnementale en rapport avec le sol, et les connaissances scientifiques montrent que la ressource sol n’est pas utilisée de manière durable en Suisse. » Entre 1983 et 2009, on perdait 1,1 m2 de terre cultivable chaque seconde, ce qui représente un total de quelque 85 000 hectares, c’est-à-dire l’équivalent de la surface du canton du Jura. Dans la décennie suivante, 29 800 hectares supplémentaires ont disparu, soit l’équivalent de la surface du canton de Schaffhouse.

La perte des terres, qu’elles soient cultivées ou non, est principalement due à l’activité humaine.
La perte des terres, qu’elles soient cultivées ou non, est principalement due à l’activité humaine.

Il est grand temps d’agir

Si l’être humain ne consomme pas directement la terre, 95 % de ses aliments en dépend. Biovision considère donc qu’une utilisation précautionneuse et responsable de cette ressource naturelle est primordiale. Dans le cadre de nos projets, nous encourageons le maintien et l’amélioration de la fertilité des sols ainsi que la diffusion et l’application de connaissances relatives à l’agroécologie. Depuis 2018, Biovision sensibilise par ailleurs le grand public à l’importance de la santé et de la fertilité des sols au travers du projet « Sounding Soil ».

Il est aujourd’hui urgent d’aller encore plus loin dans ce travail de sensibilisation à la nécessité de protéger nos sols. Les décideur·euses politiques et les milieux économiques doivent agir et mettre en œuvre des mesures concrètes. L’heure tourne. Il est grand temps de consacrer à cette précieuse ressource qu’est le sol, l’attention et le soin qu’elle mérite.

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