L’agroécologie prend son envol

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Laura Angelstorf, Rédactrice

Complexe, chronophage et impossible à mettre en œuvre à grande échelle – tels sont les préjugés courants sur l’agroécologie. Pourtant, un nombre croissant de résultats de recherche montrent qu’il s’agit une approche convaincante pour un système alimentaire durable. Son financement reste néanmoins un casse-tête. Découvrez comment Biovision insuffle de l’élan dans ce domaine.

Dès 2019, le rapport « Money Flows » (voir encadré), co-rédigé par Biovision, révélait que seule une fraction des fonds de recherche était allouée à la recherche agroécologique et que l’on continuait à miser sur les pratiques conventionnelles dans l’agriculture. Les bailleurs de fonds ont fait valoir qu’ils privilégiaient les résultats rapides et rentables dans leurs décisions de soutiens de projets – deux critères favorisant l’agriculture conventionnelle. Cependant, de plus en plus de preuves scientifiques démontrent les nombreux avantages environnementaux et sociaux à long terme de l’agroécologie et montrent que celle-ci peut également être rentable.

Le rapport « Money Flows »

Le rapport « Money Flows » , rédigé par Biovision en collaboration avec IPES-Food et l’Institute of Development Studies (IDS) et publié en 2019, a analysé les flux financiers qui accompagnent la recherche agricole pour le développement. Il est parvenu aux trois conclusions suivantes:

  • La majeure partie des fonds de recherche continue d’être allouée à l’agriculture conventionnelle qui nuit à l’environnement.
  • Là où les pratiques agroécologiques sont encouragées, l’accent est mis sur la méthode de culture et la production. Seul un aspect partiel de l’agroécologie est donc pris en considération. Les aspects sociaux, sociétaux, politiques et économiques, tels que les questions d’économie circulaire ou d’économie solidaire, ou encore la question de savoir à qui appartient la terre cultivée, restent peu explorés. Ils seraient pourtant décisifs pour la conception d’un système alimentaire durable.
  • La plupart des fonds destinés au développement du continent africain ne vont pas en Afrique, mais financent des projets dirigés par des instituts de recherche des pays du Nord. Les études ont pourtant montré que les programmes de recherche africains sont plus orientés vers l’agroécologie et prennent donc en compte le système alimentaire de manière plus globale.
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Des exemples pratiques convaincront les bailleurs de fonds

La théorie confirme que l’agroécologie est rentable et présente de nombreux autres avantages : par exemple, la promotion de l’économie circulaire et solidaire ou la gestion équitable des terres. « L’agroécologie est un domaine qui requiert de nombreuses connaissances. Les économies réalisées par exemple au niveau des intrants dans la culture, comme les engrais ou les semences achetées, sont employées ailleurs sous forme de savoir. Il faut donc investir afin que les agriculteur·rices et les entrepreneur·euses comprennent mieux en quoi consiste l’agroécologie. Si les jeunes entrepreneur·euses peuvent prouver qu’ils sont rentables, cela attirera également des investisseur·euses. Nous pourrons ainsi faire sortir définitivement l’agroécologie de son marché de niche » explique Stefanie Pondini, responsable de programme Dialogue politique et plaidoyer chez Biovision.

Il n’existe encore que peu de projets phares, comme COMACO ou Sylvas Food Solution en Zambie, qui vont au-delà de la structure de la petite exploitation agricole et qui peuvent convaincre les investisseur·euses de la rentabilité de l’agroécologie. Toutefois, les premières entreprises structurées selon les principes de l’agroécologie commencent à voir le jour. L’organisation partenaire de Biovision, Sustainable Agriculture Tanzania (SAT), a déjà fait un grand pas dans cette direction avec la création de SAT Holistic Group Limited.

Biovision a conscience qu’il existe d’autres excellent.es acteur·rices agroécologiques et de petites entreprises qui, avec un soutien approprié, sont capables de fonctionner de manière autonome et rentable.

Marketing of organic food in Tanzania – Sustainable Agriculture Tanzania at the Symposium 2021

Garantir le succès grâce au savoir

Afin d’augmenter durablement les investissements dans de tels projets et entreprises agroécologiques, il faut non seulement que les bailleurs de fonds soient sensibilisés et convaincus, mais aussi que les agriculteurs et agricultrices aient davantage de connaissances en matière d’agroécologie et d’entrepreneuriat.

Les premières recherches de Biovision auprès d’expert.es ougandais.es et kenyan.es ont montré qu’il serait intéressant de créer un pôle de connaissances et de mise en réseau qui proposerait des informations générales sur les processus de gestion d’entreprise et formerait les entrepreneur·euses au développement de modèles commerciaux agroécologiques. Il manque également des plateformes permettant aux entrepreneur·euses et bailleurs de fond de se rencontrer et collaborer.

 « Biovision y voit une grande opportunité de s’engager pour que bientôt, davantage d’investisseur·euses philanthropiques mais aussi du secteur privé interviennent et contribuent activement par leurs investissements à la création d’un système alimentaire durable », estime Fabio Leippert, responsable de programme Dialogue politique et plaidoyer chez Biovision.

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Stefanie Pondini travaille depuis plus de 12 ans chez Biovision au sein du département de Dialogue politique et plaidoyer. Elle a vécu ce passage de l’anonymat à la reconnaissance et marqué Biovision de son empreinte.
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